Flashback quasiment six semaines en arrière : j’atterris sur le sol britannique et plus précisément du côté de Bristol, dans le but (complètement assumé) et l’espoir enfin réalisé de pouvoir assister à l’un des plus imposants festivals européens de musique(s) alternative, post-rock, math-rock, post-metal, ou post… “tout ce que vous voulez” : le fameux ArcTanGent.
Une 7e édition pour cette grande messe des musiques « post… mais pas que » dont le succès ne semble pas se démentir. Et lorsque l’on admire la prog’ de cette année, difficile d’être surpris. Pour ma part, je pense sincèrement que la moitié des groupes de post ou math que je rêvais de voir un jour en live étaient présents pour cette cuvée 2019. Un petit coup d’œil rapide sur quelques-uns des grands noms ayant déjà foulé les scènes du fest’ par le passé a également de quoi faire quoi baver : GY!BE, Explosions In The Sky, toe, Russian Circles, American Football, 65daysofstatic, Mono,… excusez du peu, il semblerait que le l’ArcTanGent soit un passage obligé des représentants du genre. Pour notre plus grand plaisir!
Si ce n’est quelques petits défauts d’organisation (pas de douches sauf VIP, 15 £ de droit d’entrée sur le camping la veille du début des festivités, etc.), le festival n’en reste pas moins extrêmement agréable : situé sur les terres de la Fernhill Farm, il est basé dans le cadre bucolique de la campagne anglaise, avec ses moutons, ses prés verdoyants, ses murettes de grosses pierres. De son côté, l’accueil des bénévoles est chaleureux, décomplexé, humain. On retrouve ici l’hospitalité quais légendaire des habitants de la région, forts sympathiques et accueillant. A noter que le festival propose également une option “glamping”, pour ceux qui viendraient sans tentes (ce qui était mon cas), et contre une somme ma foi un peu élevée, vous pouvez arriver sur place avec une tente garnie de matelas et sacs de couchages. Royal !
3 jours de festival donc au milieu des intempéries et notre nouvelle amie : à savoir la météo typiquement anglaise, mais sur un site plutôt bien organisé avec quatre scènes qui jouent en alternance et pléthore de food-trucks plus appétissant les uns que les autres (d’ailleurs, ce petit burger végé au pesto maison… une tuerie!) ; mais pas grand chose à dire sur le « before », si ce n’est que quelques centaine de personnes étaient déjà présentes, une pinte à la main (forcément on est en Angleterre), prêts à en découdre dès le lendemain.
Pas le temps de niaiser, juste de prendre une pinte puis se diriger vers le premier concert (Floral en l’occurrence). Dans l’ensemble, le son est vraiment bon pour la plupart des concerts, même si le tech se lâche parfois (basses trop devant, mix un peu foiré, volume trop fort, etc), si bien que je ne saurais élire un palmarès des meilleurs groupes vus là-bas. Bon en fait on va quand même short-lister Conjurer, Frontierer, Caspian, Nordic Giants, Car Bomb, Covet, Meshuggah… Oui la liste est longue. Le hic, c’est que l’on est du coup parfois/souvent « déçu » de devoir partager son temps entre deux groupes (quand tu hésites à aller voir soit TTNG soit Car Bomb, c’est un peu compliqué). Petit plaisir « groupie » : la plupart des artistes sont présents sur le fest’ et c’était du coup assez agréable de pouvoir aborder en toute tranquillité Yvette Young de Covet, Pete Lambrou de VLMV, le lead guitarist de Polyphia et quelques autres.
On note tout particulièrement la prestation de Pijn & Conjurer qui ont joué pour la première fois leur split-album commun ‘Curse These Metal Hands’, pour expérience forte et attendue qui semble rallier tout le monde à sa cause ; l’émouvant “Tribute to Dan” de Beft (½ Cleft + Alpha Male Tea Party) en forme de concert hommage à Dan Wild-Beesley, guitariste virtuose de Cleft, décédé en novembre 2018, ; et bien évidemment le fameux « big hit » du festival, soit les enfants chéries de l’ATG, j’ai nommé And So I Watch You From Afar venus interpréter leur album éponyme en intégralité.
Seul gros inconvénient de cette aventure : le temps. Le vendredi est ainsi la parfaite incarnation de la météo « à l’anglaise » avec une averse qui a débuté à 8h du matin pour se terminer à… 8h du soir. Même les vieux pêcheurs de Bristol disent n’avoir jamais vu ça. Et vu que le site est situé à la campagne, le sol est vite métamorphosé en un bourbier infernal sur lequel on perd plus facilement ses bottes que son courage. Néanmoins, cela ne semble pas trop atteindre l’optimisme de nombre des festivaliers qui en jouent plutôt qu’autre chose.
Outre orga’ et vécu du sur place, il faut bien avouer que lorsque l’on parle de “festival spécialisé”, on est encore dans la demi-mesure et tous les genres du « post » y passent, du Math-Rock au Math-Core, du Post-Rock au Post-Metal, du Hardcore au Post-Hardcore, de l’expérimental à l’ambient, de la Noise au Silent Disco, sans aucune considération pour les limitations géographiques si bien que l’on voyage ainsi de l’Europe aux USA, comme de l’Asie (Elephant Gym, les petits préférés de la rédaction de Score A/V d’ailleurs) à l’Amérique Centrale (bonjour aux DJ Perro qui ont fait le déplacement exprès depuis leur Mexique natal). De même, toutes les « générations » du genre sont représentées depuis les quasi vétérans de Cult Of Luna et Meshuggah aux tout “jeunes” Dags!
Indispensable de la scène alternative actuelle, tant il promeut sa diversité, son éclectisme et son accueil chaleureux, on le répète, l’ArcTanGent, élu à juste titre “Meilleur festival du Royaume-Uni 2018”, garde continuellement le cap avec ses deux objectifs fondateurs à savoir : la célébration d’une scène unie et riche de sa variété d’une part ; et la satisfaction des festivaliers, autant musicalement du point de vue du confort organisationnel, d’autre part.
Avec un billet au tarif relativement accessible au vu de la qualité de la prog’ (comptez 120€ en moyenne), il va sans dire que c’est un immanquable pour qui aime cette scène. On ne s’étonne d’ailleurs pas de voir émerger progressivement en Europe d’autres manifestations du même acabit, avec la même orientation et le même esprit convivial, des festivals qui commencent à former un véritable support et tremplin pour tous les groupes (notamment de niches) qui n’auraient pas forcément accès à d’autres “gros” festivals européens.
Un point que nous allons explorer plus avant lors de la seconde partie de ce reportage, lequel nous emmènera cette fois en Espagne et plus précisément du côté de l’AMFest de Barcelone, pour une programmation musicale toute aussi alléchante.