Label : Moment Of Collapse Records // Hand Of Death Records
Style : Post-Metal/Sludge/Post-Hardcore
Ambiances oppressives, sourdes qui dès les premiers instants laissent planer sur l’auditoire une menace latente, annonciatrice de l’apocalypse à venir, Cranial met d’entrée de jeu le sujet sur la table afin d’envoyer son tout premier album long-format sur orbite. Nous voici prévenu : ça va être lourd, puissant, anxiogène, quasi étouffant et ça va envoyer du riff brontosaure comme rarement. Et là, ce ne sont encore que les premières minutes de l’inaugural « Dark », premier des quatre monolithes composant ‘Dark Towers / Bright Lights’. Et le pire, c’est qu’à ce moment de l’album, ce que propose le groupe allemand n’est encore qu’instrumental. Alors forcément quand le ‘chant’ entre en scène, autant dire qu’on ramasse. Et pas qu’un peu.
Riffing en titane, section rythmique qui déroule en mode bulldozer, aboiements vocaux qui ravagent ce qui reste de tympan une fois que le groupe a déjà mis les parties instrumentales, on l’a compris : le premier méfait long-format du groupe composé d’ex-Omega Massif (oui comme Phantom Winter par exemple…) colle une dégelée monumentale à ses auditeurs. En même temps, avec un pedigree pareil, il ne pouvait en être autrement question post-metal/sludge/post-hardcore de l’enfer. Le genre qui barbouille salement les platines dès lors que les Allemands libèrent leur kraken musical. Une créature hybride et vorace qui dévore la platine, le tout étant en plus orchestré par l’une des références européennes en matière de hard de qualité supérieure qu’est le label Moment Of Collapse Records (Black Table, Cataya, Heaven In Her Arms, Meraine, Noise Trail Immersion…). Pas de doute, on tient un truc-là qui sort de la norme et qui va faire mal. TRES mal.
Onze minute et vingt-quatre secondes d’une première déflagration tellurique et sans concession, Cranial met son auditoire à terre et ne semble pas trop décidé à relâcher son étreinte. La preuve avec la seconde piste de l’album : un « Tower » qui joue avec ses effets de prod’ légèrement synthétiques avant de se lâcher sur un gros coup d’accélérateur façon grindcore des familles, pour remettre ses riffs en avant, bien aidé en cela par une production cannibale qui permet aux teutons de livrer une partition d’une rare efficacité. Lourd mais pas que, lent mais parfois plus effréné, féroce et brutal, ‘Dark Towers / Bright Lights’ est l’archétype de ce que l’on attend généralement d’un album évoluant dans ce registre, sans jamais renier sa dimension rock (bon particulièrement heavy dans le cas présent on ne va pas se mentir). Screamo et punk aussi ; foncièrement post-hardcore surtout.
Quelque part entre Cult Of Luna, Neurosis, Pelican et Mastodon en passant par l’évidence Omega Massif et un zeste de Sumac (en moins chiant), Cranial se pose avec ce premier album comme un outsider sérieusement capable de renverser le trône de sa catégorie musicale avec un « Bright » languissant qui dompte les nerfs de l’assistance en même temps qu’il prépare le terrain à un « Lights » lâché dans la fosse pour concasser enceintes, tympans et ce qu’il nous reste encore de neurones après le passage du cyclone allemand. Et s’il y a encore ses petits effets sonores qui confère à l’ensemble un petit côté futuriste et clinique déshumanisé, c’est pour mieux asséner son propos au marteau-piqueur. Impénétrable et d’une rugosité implacable, ‘Dark Towers / Bright Lights’ démontre que quelques dix-huit mois après le très solide EP ‘Dead Ends’, la scène post-tout ce que tu veux du vieux continent s’est trouvé un nouveau patron.