Label : Ripple Music // Hell Prod
Style : Post-Stoner/Progressif/Rock
Après avoir exploré de fond en comble l’univers du heavy-rock/stoner pur et dur avec leurs deux premiers efforts (‘Room 159’ puis ‘Soundtrack From The Motion Picture’), les toujours très actifs Los Disidentes Del Sucio Motel ont peu à peu fait évoluer leur griffe musicale au fur et à mesure que des wagonnets de formations contemporaines se chargeaient d’épuiser le filon – mode oblige dans le milieu de la musique, quand quelque chose marche, tout le monde le refait – D’abord avec ‘Arcane’ et son heavy-rock légèrement doom, carrément fuzz, surtout ouvertement cinématographique puis maintenant ‘Human Collapse’, tableau sonore grandeur nature dévoilant l’envers du décor d’une dystopie post-apocalyptique sombre et ténébreuse, rock et envoûtante.
Un album pour lequel, le groupe se réinvente en développant une musique post-stoner/prog/rock organique et fascinante, cherchant de la première à la dernière seconde à ne jamais refaire ce qu’il avait déjà fait par le passé. Los Disidentes Del Sucio Motel ont maintenant une dizaine d’années de labeur derrière eux et auraient pu – comme tant d’autres que l’on ne citera pas ici – se reposer sur leurs acquis, armés d’une écriture à l’efficacité imparable. Mais le risque de s’écraser sur le récif du cliché et des poncifs du stoner-rock aurait été inévitable et les gaziers ne voulaient certainement pas s’abaisser à jouer la carte de la facilité pour se conforter dans les certitudes. Alors ils ont brisé leurs codes musicaux, sont sortis de leur zone de confort pour écrire une partition plus mature, plus complexe, peut-être un peu moins directe que par le passé, mais dans le même temps bien plus organique et obsédante.
Comme toujours chez eux et parce que certaines choses ne changent jamais – on n’est pas à l’abri d’un paradoxe – les cinq membres de la Maverick Connection (ils portent tous un pseudo scénique hérité de Top Gun histoire de ne pas non plus trop se prendre au sérieux), posent leur sujet par le biais d’une intro laissant déjà présager de ce qui va suivre en instaurant une ambiance ne pouvant qu’aiguiser notre intérêt, attiser l’envie de découvrir la suite. Laquelle prend la forme d’une « Decision » qui aligne d’entrée de jeu les riffs mastodontes histoire de rappeler qui sont les patrons du game. Une prod’ monstrueuse (l’album a été enregistré au Cube Studio par le duo Yann Morel & Sebastien Descamps, puis mixé par Kurt Ballou de Converge et enfin masterisé l’incontournable Alan Douches, ce qui vous pose un album de bonhommes), du charisme par palettes entières, une maîtrise formelle indécente et un songwriting des plus ciselés histoire de parachever ce premier ‘vrai’ morceau : pas de doute, le groupe a réussi sa mue créative.
Le reste ne fera que confirmer l’évidence : à savoir que Los Disidentes Del Sucio Motel ne sont plus un groupe de stoner ‘de plus’, évoluant dans un microcosme où les formations leur ressemblant plus ou moins pullulent, mais bien plus que cela. Simplement un cinq-majeur rock, au sens le plus strict et pur du terme. Sauf que de catégorie supérieure à la moyenne. En témoignent des tubes du calibre de « Departure » ou de « Trip », autant de pépites démontrant que le groupe invente sa propre grammaire musicale, entre rock à tendance prog’ typiquement 80’ et stoner post-moderne (« Border »). Epique, un peu emphatique mais pas trop, par instants taillés pour le live dans un stade façon festivals rock australiens, les riffs puissants et les chœurs fédérateurs, ‘Human Collapse’ aligne les hymnes rock et aborde le glissement vers le prog’ old-school (« Community ») sans jamais verser dans le lacrymal mais avec ce petit supplément d’âme qui va chercher l’émotion brute (« Rebirth ») au fond des tripes.
On se surprend à penser à une sorte de Queen post-moderne qui aurait été infusé au bon vieux stoner des familles ; et alors que le groupe en remet une couche avec ses claviers avant de lâcher le tube aux refrains qui mettent le monde à genou et un « Downfall » puissamment addictif, on comprend qu’il a accouché ici de son petit chef d’oeuvre. D’autant qu’il en rajoute encore un second juste (de ‘hit’) derrière avec le phénoménal « Determination ». Après tout, au point où on en est, autant se lâcher. Et comme ils en prennent note, histoire de définitivement éteindre toute velléité critique à leur encontre, Los Disidentes del Sucio Motel parachèvent leur album sur un « Arrival » terminal au riffing encore une fois cinglant et salvateur, un dernier titre qui catalyse un peu tout ce que l’on avait pu entrevoir lors des précédents.
Un grand cru.
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